La cuisine anti-gaspi, késako ?? tout le monde en parle mais qu’est ce que c’est au juste ? Je propose de t’expliquer ici ce qu’on entends par “cuisine anti-gaspi”, et tu vas voir que ce n’est pas forcément ce que tu penses.
Bien sûr, il est question de limiter le gaspillage alimentaire mais ce n’est pas obligatoirement une question d’engagement écologique ( bien que ce soit un très bon moyen d’apporter sa pierre à l’édifice de la sauvegarde de la planète ). La cuisine anti-gaspi est avant tout une cuisine de bon sens, une cuisine où le fait de jeter doit être une exception. C’est une cuisine ou chacun peut trouver sa place et piocher des idées selon ses envies, elle est accessible à tous.
Que signifie anti-gaspi ?
Le terme anti-gaspi vient de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Lorsque j’ai démarré mon activité en 2014, c’est à dire quand j’ai commencé à partager mes recettes sur les réseaux sociaux et à donner des cours de cuisine, ce terme était quasi inconnu. La lutte contre le gaspillage alimentaire faisait figure de passade pour personnage loufoque et cuisiner la totalité d’un produit y compris fanes, carcasses et os était presque considéré comme trouble psychiatrique.
A ce propos, les gens qui consommaient les fanes de légumes étaient très sérieusement nommés les ” déchétariens” . J’imagine qu’un jour, un type a trouvé drôle de faire un parallèle Végétarien / Déchétarien puisque consommer les fanes et épluchures d’un légume était alors considéré comme une pratique un peu fanatique des amoureux de la nature. Cette appellation franchement pas engageante ne m’a pas vraiment aidé au début, il a fallu trouver quelque chose de plus sympa. Anti-gaspi, ça sonne tout de même mieux que déchétarien, non ? Bref, on est loin aujourd’hui de ce qui était il y a peu.
Si le terme anti-gaspi est aujourd’hui entré dans notre quotidien, il faut bien dire qu’il ne signifie pas vraiment la même chose pour tout le monde. Je ne parlerais ici que de son sens en cuisine. La cuisine anti-gaspi n’est pas une vie anti-gaspi ! c’est juste de la cuisine où l’on essaye de jeter le moins possible et de consommer ce qui est consommable. C’est ma façon à moi de lutter contre le gaspillage alimentaire.
Le gaspillage alimentaire
Puisqu’on en parle, il faut bien donner quelques chiffres. Grosso modo, on compte pour chaque français environ 30 kg de déchets alimentaire par an dont 7 kg de produit encore emballé. C’est à peu près la même chose pour tous les pays évolués.
Le consommateur jette, mais le producteur également, ainsi que le transporteur et le revendeur. Lorsqu’un produit arrive dans le frigo d’un consommateur, il a déjà eu un sacré parcours, souvent il a fait beaucoup de kilomètres, parfois il a longuement patienté dans une chambre froide ou une chambre de mûrissement et il a risqué sa vie à chaque étape :
- chez le producteur qui doit fournir des produits calibrés ( poids, taille, couleur ) selon des cahiers des charges précis. Si pour une raison ou une autre sa production n’est pas conforme, il doit la jeter. Pour peu que les courgettes aient poussées de travers, allez zou ! poubelle.
- durant le transport : le fameux ” tombé de palette ” n’est pas qu’une expression, parfois il arrive que des palettes tombent ! si, si je t’assures. Ex belle fille de transporteur, je sais ce que je dis et crois moi, ce truc là arrive vraiment dans la vie. Donc t’as une palette qui tombe, y’a un bout de palette cabossée, allez hop ! le type à qui tu dois livrer a le droit de refuser la marchandise. Et zou ! poubelle.
- chez le revendeur : le produit est bien arrivé, il est en rayon, tout va bien. Mais il y a une DLC dessus ( date limite de consommation ) et va savoir pourquoi, il y a pleins de clients qui choisissent systématiquement le produit à la DLC la plus longue en écartant soigneusement ( ou pas soigneusement du tout ) les dates les plus proches. On se retrouve ainsi avec de pleines brouettes de produits parfaitement consommables qui seront jetés parce que non achetés. Et on ne compte pas les produits perdus parce que non respect de la chaîne du froid, emballage défectueux, mauvaise commande, etc…..
Tout le monde gaspille, certains plus que d’autres. D’un produit encore emballé oublié au fond du frigo à un reste d’assiette en passant par un plat non terminé au restaurant…..on gaspille tous et il est hors de question, pour moi tout du moins, de culpabiliser les gens. La cuisine anti-gaspi est là pour apporter des solutions de consommation un peu plus juste à ceux qui veulent changer un peu leur manière de faire.
Le principe de la cuisine anti-gaspi
Cuisiner anti-gaspi signifie donc faire en sorte de jeter le moins possible. La cuisine anti-gaspi est le fait de cuisiner un produit au maximum, c’est à dire consommer ses fanes, épluchures, carcasses et carapaces lorsque c’est possible. Cela va demander un peu de cuisine, d’organisation et d’idées de recettes surtout ! en ça, je peux t’aider et tu trouveras pleins d’idées de recette anti-gaspi ou dans mon livre, Ma petite cuisine anti-gaspi ( editions Eyrolles ) que tu peux te procurer ici.
Lorsqu’on cuisine un produit dans sa totalité, il est mieux de se procurer un produit de bonne qualité avec le moins de pesticide possible. En effet, ce sont les fanes et la peau des légumes et des fruits qui vont stocker la plus grande partie des produits chimiques. Sans te recommander d’acheter bio ( le terme est tellement galvaudé et il y a tellement de normes débiles que ça ne veut rien dire ), tu peux acheter des produits d’agriculture raisonnée. Le mieux est de trouver des petits producteurs locaux pour pouvoir consommer correctement.
À partir de ce moment, tu vas pouvoir utiliser tes fanes pour faire des soupes ou des quiches, tu pourras conserver tes épluchures pour faire tes propres bouillons de légumes, faire des bouillons de volaille avec les os de ton poulet rôti de dimanche dernier, faire des bisques avec tes carcasses de langoustines, de la soupe de poisson avec des têtes et des arrêtes, des confitures minutes avec un fruit un peu vieux, etc…..
La cuisine anti-gaspi c’est aussi savoir transformer les restes pour les rendre appétissant à nouveau. Un reste de purée deviendra gnocchi, un reste de rossbeef deviendra carpaccio, un reste de ratatouille sera une base parfaite pour un tajine aux oeufs, etc…..
Tu n’as pas besoin d’être un as des fourneaux pour cuisiner anti-gaspi, quelques petites recettes de base t’aideront à improviser beaucoup de repas. Savoir faire une bechamel ( tu peux même en acheter toute prête en brique si tu veux, parfois ça sauve une soirée ! ) te permettra d’improviser un gratin avec ce qui traîne dans ton frigo : restes de légumes, de pâtes, de fromage, etc….Avoir une pâte brisée ou feuilleté en permanence te permettra de faire des quiches à tout ! Tu vas voir, c’est facile comme tout.
Les Date Limite de Consommation, on en parle ?
Ces dates apposées sur tout produit consommable, c’est la plaie du gaspillage alimentaire. Ces dates, apposées de manière assez farfelues le plus souvent, se sont substituées à nos sens et à notre logique en nous enjoignant de jeter des produits qui, parfois, sont encore parfaitement bons. Une tranche de jambon a l’air parfaitement normale ? ah oui mais la date dit que non alors on jette. C’est n’importe quoi ! Le fromage a l’air normal mais la date est dépassée ? on jette. La date des oeufs est dans 3 jours, il vaut mieux les jeter non ? ASSEZ !!!
Réfléchis : si ça à l’air bon, si ça sent bon, tu goûtes un petit bout. Si c’est bon alors c’est que tout est ok !
Les dates limites de consommation ( DLC ) sont censées t’indiquer qu’un produit doit être consommer AVANT telle date. Les dates de durabilité minimum ( DDM ) t’indiquent qu’un produit est au meilleur de ses qualités gustatives JUSQU’À telle date mais qu’il peut encore être consommé par la suite. Il faut savoir que le principe des dates obligatoires date des années 80 et que chacune est laissée libre à l’attention du fabricant. Chaque fabricant a donc sa propre équipe ” sécurité, date et tout le bazar ” et choisit d’apposer ce qui l’arrange.
Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est bien plus sérieux que ça quand un même fabricant produit des crèmes desserts ( on se lève tous pour ces crèmes si tu vois ce que je veux dire…) avec DLC à 1 mois pour la France et à 9 mois pour le Maghreb. Ou quand un même paquet d’emmental râpé à une DLC à 3 semaines pour la métropole et à 3 mois pour les DOM TOM !
Dans le premier cas, la date est allongée parce que cette fameuse crème est très chère au Maghreb et que personne ne l’achèterais si la date était courte. Dans le second cas, les produits voyageant en bateau, on est bien obligé d’allonger la date en fonction du temps de trajet…..
C’est bien la preuve que ces dates ne doivent pas être prise au pieds de la lettre et qu’il faut tout de même réfléchir un peu à ce qu’on fait. Il est évident que si un poisson est vert et sent mauvais, on ne va même pas regarder la date pour voir s’il est bon, on va jeter parce que c’est normal. Idem pour une viande daubée, si elle n’est plus bonne on le voit. En revanche, si tout a l’air ok, la couleur, l’odeur, la texture, alors c’est que c’est ok.
Acheter moins, acheter mieux
La cuisine anti-gaspi va te permettre de gérer tes courses différemment. Là où tu ne faisais qu’un plat avant, aujourd’hui tu en feras deux. Lorsque tu achètes une botte de carottes, tu sais que tu feras un autre plat avec les fanes. Lorsque tu achètes une botte de radis, tu feras également une soupe avec les feuilles.
La cuisine anti-gaspi va t’amener à faire tes courses différemment. Plus tu vas t’intéresser à ce que tu consommes et plus tu vas t’intéresser aux produits que tu achètes. Cela signifie souvent moins de grandes surfaces et plus de marchés, plus de petits producteurs, plus de produits locaux. Le coût des produits de qualité est souvent un peu plus élevé que ce que tu trouveras en grande surface ( et encore ! ) mais comme tu auras appris à cuisiner la totalité de ce que tu achètes, au final tu t’y retrouveras et au passage, tu auras consommé plus responsable et plus sain.
Ce que la cuisine anti-gaspi n’est pas
La cuisine anti-gaspi n’est pas une cuisine gratuite. Rien ne m’énerve plus que les gens qui imaginent que cette cuisine, qui est de bon sens et responsable, puisse être synonyme de radinerie ou de gratuité. Quand je vois des magazines titrer ” la cuisine gratuite ” ça me rend folle. Quand je lis dans des articles ” n’hésitez pas à demander aux marchands des fanes de légumes, ils vous les offriront de bon coeur ” ce n’est pas vrai !! tu veux des fanes de carottes ? Achètes une botte de carottes ! c’est pas plus compliqué que ça.
La cuisine anti-gaspi n’est pas une cuisine de pauvre, une cuisine de fin de mois. C’est une cuisine du quotidien qui s’adresse à tous les consommateurs, c’est une cuisine ludique, c’est un mode de consommation logique et de bon sens. Quand un produit est beau et bon, autant l’exploiter au maximum. Si parfois on peut cuisiner de succulents plats avec trois fois rien comme un plat de spaghetti au pesto de fanes de radis, ce qui j’en conviens n’est pas un plat très cher, on peut également retravailler les restes d’un rôti de veau pour en faire un vitello tonnato. Et oui, on peut faire de l’anti-gaspi avec des produits chers.
La cuisine anti-gaspi n’est pas un truc de bobo écolo. C’est avant tout de la cuisine et du bon sens. Si tu as l’âme écologique c’est très bien. Si cette façon de cuisiner te parle parce qu’elle répond à un besoin de consommer plus responsable pour aider à préserver la planète alors c’est très bien. Si tu te fiches royalement de l’écologie mais que tu en a marre de jeter et cherches une façon de cuisiner autrement, c’est très bien aussi. Quelle que soient tes raisons, la cuisine anti-gaspi est pour toi.
La cuisine anti-gaspi n’est pas une cuisine zéro déchet, ni une cuisine végétarienne, ni une cuisine vegan. Elle peut l’être, bien sûr, mais ce sera juste en fonction de toi. La cuisine anti-gaspi c’est ne pas jeter, ça ‘a rien a voir avec le fait d’acheter en vrac pour limiter les emballages ou de ne pas consommer de produits carnés pour limiter l’emprunte écologique du produit. Si tu trouves dans la cuisine anti-gaspi de quoi convenir à tes convictions, que tu sois vegan, végétarien ou zéro déchet, alors c’est très bien mais si tu n’es rien de tout ça, tu peux parfaitement pratiquer une cuisine anti-gaspi toi aussi.
Voilà, avec tout ça j’espère t’avoir donner envie de rejoindre cette cuisine ludique et sympa, tu trouveras sur ce blog pleins d’idées ainsi que sur ma page facebook La petite cuisine anti-gaspi. N’hésites pas à laisser en commentaire de cet article tes propres astuces et recettes anti-gaspi, toute idée est toujours bonne à prendre !
Je découvre vos recettes. Très intéressant. Continuez.